Depuis
le temps déjà (ébauche de réflexion)
Jann
Halexander, pour un certain public fidèle et varié, ce sont
quelques chansons-clés : A Table, Déclaration d'amour à un
Vampire, Il est minuit Docteur Schweitzer, Brasillach 1945, L'Amant
de Maman. Son jeu de piano évoque le cabaret avec des envolées
lyriques, qui allie l'humour acerbe à la mélancolie, la
provocation, ce qui lui a valu les surnoms de « vampire » ou de «
Jean Guidoni africain ». Franco-gabonais, né Aurélien
Makosso-Akendengué à Libreville en 1982, il est aussi auteur et
acteur de films expérimentaux aux sujets atypiques : J'Aimerais
J'Aimerais, Occident, La Bête Immonde. Souvent là où on ne
l’attend pas, mystérieux voire introuvable du « grand public »,
il se considère lui-même comme un franc-tireur à la marge du
show-biz. Depuis ses débuts en 2003 il a vendu 40 000
d'exemplaires* de CD, DVD, livres, places de concerts, donné des
centaines de concerts en France, Belgique, et séduit également hors
du monde francophone comme l’Allemagne par exemple. En marge du «
système » mais non « hors-système » : certaines de ses chansons
passent en radios, ont été remixés pour les clubs, il squatte en
dilettante les plateaux télés où il s'exprime sur ses sentiments
amoureux ou son identité métisse. Une exposition à Angers lui a
été consacrée en 2006 au feu café l'Imanol. Ses films et disques
distribués en France sont soutenus par Ouest France, Têtu, Tribu
Move, Chorus, Vendée Matin, Longueur d'Ondes ou Idoles Mag.
Tout
cela rend Jann Halexander définitivement insaisissable et
dérangeant.
Accordant
autant d'importance à la forme qu'au fond, il est intransigeant sur
le graphisme de ses albums, sur l'atmosphère de ses clips. Son
éclectisme peut perturber car il clame aussi bien son admiration
pour Anne Sylvestre que pour Mylène Farmer, confesse avoir des
chansons de Jean Vasca, Clémence Savelli ou Jean-Pierre Réginal
dans son lecteur mp3. Des artistes aussi différents que Nicolas
Duclos, Sylvain Yardin, Vincent Ahn ou Ouman Dee reprennent ses
chansons, aussi, si pour ses détracteurs, il est la caricature même
de l'illustre inconnu, le public qui le suit ainsi qu'une partie du
monde médiatico-culturel le respecte pour une forme
d'indécence, de franchise et d'altruisme. Méconnu mais pas
underground, méconnu, oui, mais certainement pas élitiste … même
si ... il n'est pas un chanteur pour intellectuels qui se
regardent le nombril, alors même si une certaine presse
décontenancée évite de parler de lui, des ouvrages variés sur la
chanson, le cinéma, la sociologie le citent parmi leurs références
depuis des années. Chanteur de l'intime, c'est aussi le chanteur de
l'Ailleurs, évoquant le veld sud-africain, Angers, la ville de sa
mère – l'écrivaine Anne-Cécile Makosso-Akendengué-, le pays
natal, pays du père, le Gabon. C'est l'histoire d'un être au
premier abord complexe, mais qui peu à peu, finalement rejoint
l'universel. Artiste méconnu, oui, mais pas inconnu … il est fini
le temps où un artiste pouvait être connu et adulé de la terre
entière, créer le consensus général, si ce temps-là a existé.
La folie des Top 50 semble lointaine...
Quand
il récite en public Le Mulâtre, il conclut à la fin que ce
Mulâtre, c'est lui et quand il parle de lui, il parle des autres, il
parle de nous. C'est ce « nous » qui finalement lui permet de se
maintenir dans un étrange chemin de vie artistique, un peu
brouillon. Il y a l'impudeur des sentiments, des fêlures d’amour,
des questions du métissage vécu et non idéalisé, des rapports de
filiation… Le public qui l'aime a des avis politiques opposés, des
origines sociales variées, des cultures différentes, mais n’est-ce
pas là, la reconnaissance et la signature d’un créateur. Il a été
l'un des premiers artistes d'origine africaine à aborder franchement
la question de l'orientation sexuelle dans ses œuvres … cependant
il n’est pas un personnage communautaire. Pour les spécialistes de
marketing, il est une énigme car difficile à classer, et
irrécupérable par qui que ce soit. Il existe peut-être bien une
France de Jann Halexander dans laquelle des milliers de gens se
retrouvent. Une France discrète à l'écart des vacarmes des médias,
des tweets vides intempestifs. Plus le temps passe, plus cet artiste
longtemps énigmatique « s'humanise » et aborde des sujets qu'il
n'aurait sans doute pas pu effleurer il y a quelques années.
Lui
c'est nous, nous c'est lui. Il n'est guère étonnant que ce projet
de reprises aboutisse. L'image d’un Halexander un peu abstrait
devient dès lors plus accessible.
Michel-Xavier
Gérard, Flash News - http://flashnews.canalblog.com/
*Sources
: Lalouline Editions, Label TH, Zalys, Films de l'Ange.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire